Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Les secrets de l'Atelier de la Timbale
Les secrets de l'Atelier de la Timbale
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Newsletter
Visiteurs
Depuis la création 35 168
14 septembre 2021

Reportage graphique pour Musiques en Tonnerrois (4ème partie)

Il me reste à évoquer les concerts à proprement parler.  En fait, c'était le sujet que j'appréhendais le plus, pour diverses raisons.  Déjà, parce qu'il fallait que je sois bien placée. J'avais commis quelques menus croquis plutôt minables lors de la précédente édition, sur un bloc à carreaux et depuis le 2 ou 3ème rang du public, de façon confidentielle, et ça m'avait laissé un petit doute sur ma capacité à faire quelque chose de plutôt chouette dans les conditions d'un concert.  Mais Sophie-la-flûtiste a toujours fait en sorte que je sois bien située et j'ai vite été rassurée, de ce côté-là.  D'ailleurs, lors du concert en l'église de Junay, sa petite commune, j'ai tenu à la remercier en lui réservant à mon tour une place de choix dans mon dessin.  Il se trouvait en outre que quelqu'un avait joliment fleuri l'église, ce qui m'a un peu délivrée de la contrainte de laisser aux musiciens l'intégralité de la double-page de mon carnet.  C'est vaste, une double-page, quand on n'a que deux ou trois musiciens devant soi à chaque pièce...  J'ai donc pu, tout à loisir, consacrer une bonne partie du temps du concert à une grande nature morte inattendue, à la lumière vacillante des chandelles, ainsi qu'à une petite statue polychrome qui faisait le cachet du lieu.  Dominique-le-réalisateur avait quant à lui su rendre très discrets ses éclairages, en drappant de blanc leurs pieds.  J'étais comme un coq en pâte.

 

159

Pour le concert de clôture, j'avais un dernier souci : je n'avais pas eu l'occasion de croquer Sacha-le-pianiste, soit qu'il arrivait systématiquement après que j'avais déjà placé son collègue David au clavier, soit qu'il exécutait des pièces trop brèves pour me laisser le temps de le saisir au vol.  C'était mon objectif depuis le début : que chacun des musiciens figure au moins sur un dessin.  J'ai donc triché un peu, cette fois, et dérogé à ma résolution de ne jamais rien solliciter des participants pour m'adapter à leur agenda : je me suis assurée qu'il allait bien jouer des pièces un peu plus longues lors de ce concert et je lui ai gardé sa place au chaud dans ma composition.  La bonne surprise, c'est que j'ai pu dessiner à ses côtés Valentine-la-tourneuse-de-pages, qui n'est autre que sa fille.  Une fois encore, j'étais au premier rang et j'ai eu tout le loisir de peaufiner ma composition, en consacrant tout l'arrière-plan à la jolie église de Pacy, qui regorgeait de couleurs douces et inédites dans ma série de dessins.

 

161

Mission accomplie, donc, au terme de ces 3 jours de festival qui m'ont été une véritable fête graphique.  Le pot de l'amitié à Pacy a été l'occasion pour les musiciens de feuilleter mon carnet; c'est le moment incontournable, car rien ne remplace l'objet-carnet.  Les publications en ligne n'en donnent finalement qu'une très vague idée, et c'est tout le bénéfice irremplaçable des rencontres entre carnettistes, avec les Urban Sketchers.  On rajoute à l'intérêt graphique le grain du papier, le poids du carnet, la perception des gestes du dessinateurs et les dessins prennent une tout autre dimension.

En résumé, j'ai vraiment réalisé une aspiration qui me taraudait depuis un moment, en créant ce reportage graphique : mettre mon dessin à l'épreuve de la narration.  On me demande toujours pourquoi je ne fais pas de BD.  Franchement, je regarde depuis des mois Borris poster sur sa page Facebook les crayonnés de sa future BD sur Jack London, et, à chaque fois, je me dis qu'il a un talent que je ne possède pas : celui d'inventer des physionomies variées et vraisemblables, principalement.  Pour ne rien dire des angles de vue, des décors, des costumes et du découpage de toute une histoire en petites cases.  Les auteurs de BD sont de véritables mutants et ils consacrent tout leur temps à leur métier.  Mon cas est un peu particulier : je ne dispose pas de l'intégralité de mes semaines pour monter de toute pièce une histoire complexe.  Enfin, qui le serait, parce que les fabulettes ne m'intéressent pas plus que ça, je me connais.  Par contre, je dispose quand même de savoir-faire accumulés depuis des années et qui sortent un peu des activités depuis longtemps établies, et ce Festival de musique classique m'a permis de commencer à attacher ces ficelles entre elles...

C'est ainsi que de l'exaltation née des concerts un concept a pris forme, issu du métissage du reportage graphique, de l'urban sketching, de la BD et de l'aquarelle : la spatio-chronographie !  Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?  Il faudra certainement lui trouver un autre nom, mais elle pose les bases d'une forme artistique probablement inédite : celle qui consiste à restituer la rencontre entre un moment, un lieu, des personnes et des activités, voire des dialogues, de façon graphique.  Dans un carnet, dans mon cas, mais ça méritera certainement une exploration approfondie des autres possibilités (par d'autres personnes, peut-être, car je suis fétichiste du carnet).  Parce que, en somme, les dessins réalisés pendant le festival rendent compte de plusieurs aspects de ce que j'ai été amenée à observer.  Il s'agit du résultat d'un événement ayant rencontré mon regard, qui dispose de moyens graphiques pour en rendre compte.  Et, dans chaque double-page, le lecteur/spectateur pourra reconstituer l'image fantôme d'un moment auquel il n'a pas assisté, ou dont lui-même a eu une autre vision.  Comme apparaissent sur les photos du fin fond de l'univers prises par Hubble des galaxies depuis longtemps disparues.  

Bref, tout cela mérite d'être exploré plus avant et dépassera certainement la gerbe d'idées enthousiastes du 27 août 2021 à 18h15, mais il se peut que le moment soit historique...

Plus certainement, la couverture de la 3ème édition de Musiques en Tonnerrois restera pour moi un excellent moment de dessin, mais aussi de musique, bien que je ne sois pas la mieux placée pour en parler.  Je voulais simplement remercier ces musiciens hors pairs qui m'ont accueillie avec tant de naturel et m'ont laissé m'emparer de ce qui fait que leur vie est un festival en soi.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité