L'acariâtre Degas

A l'occasion de l'exposition Degas et le nu au Musée d'Orsay, le Figaro a sorti l'un de ses hors-séries bien écrits mais souvent indigestes consacrés aux sujets d'importance.  N'ayant pas l'intention de me rendre à Paris pour ce peintre qui ne fait pas partie de mon Panthéon, j'ai malgré tout fait preuve d'ouverture d'esprit, une fois n'est pas coutume, et ai entrepris de me cultiver un peu.  Et j'ai bien fait car, si je reste un peu mitigée sur l'ensemble de son oeuvre, j'ai toutefois davantage de respect sur la démarche de ce bourgeois misogyne et cruel en société et de compassion pour ce malheureux artiste trahi par ses yeux. 

Les nus de Degas ne sont pas forcément ce qui me plaît le plus dans son oeuvre.  Ses prostituées grassouillettes et flasques, posées comme des fleurs fanées sur les canapés de mauvais goût des lupanars parisiens n'ont rien pour emballer facilement le spectateur exigeant du XXIème siècle.  On peut apprécier le témoignage de première main que Degas livre sur les milieux du sexe de son époque, il n'empêche que ses scènes étouffantes aux couleurs criardes ne provoquent pas vraiment l'enthousiasme.

Malgré tout, Degas était un dessinateur remarquable.  Il avait la passion du trait et aurait pu s'en tenir au noir et blanc si rien ne l'avait poussé à la couleur.  Et là, on est faits pour s'entendre.  Il a absolument tenu à s'assurer une formation classiquissime, en dépit des railleries de certains de ses contemporains, pour mieux s'affranchir ensuite des canons contraignants de la peinture académique et se rapprocher des Impressionnistes, sans toutefois sacrifier à leur intransigeance révolutionnaire (à leur échelle, bien sûr...).

Pour ma part, je le trouve grand quand il s'empare du pastel, notamment quand il tente de saisir le mouvement de ses fameuses danseuses.  Mais aussi quand il repense le cadrage de ses tableaux, en laissant de grandes zones complètement vides, contrairement aux habitudes de son temps.